Auteur de succès phénomènes
pour lui ou pour d'autres, Benjamin Biolay sort un deuxième album. Des
mélodies habillées d'écrits mélancoliques.
Trente ans, un air de Petit Poucet rêveur qui aurait mis fin à
ses fugues, des initials B.B. comme une chanson de Gainsbourg, Benjamin Biolay
est l'espoir de la musique française, l'auteur-compositeur-arrangeur-interprète
le plus en vue du moment. Après un premier album, Rose Kennedy, en 2001,
à l'ambiance fitzgéraldienne, aux timbres clairs-obscurs, à
la mélancolie jazzy et dont le refrain de la chanson " les Cerfs-volants
" était le point d'orgue - " A mesure que le temps passe /
Je mesure le temps qui passe" -, il sort ces jours-ci Négatif, un
double CD (Virgin). " C'est quelque chose de plus personnel. Je ne voulais
pas avoir de repères culturels massifs comme l'histoire des Kennedy ou
le décorum des années 60. J'avais cette chanson, "Négatif",
qui traînait dans mes tiroirs depuis un certain temps. J'avais envie d'en
faire un concept d'album (NdS: je pense que la journaliste a mal entendu et
il faut lire "concept-album"...), de développer cet intitulé
dans plusieurs sens : j'ai écrit des chansons qui se finissent mal, j'ai
exprimé des sentiments négatifs, j'ai utilisé des négations...
Il y a des oppositions, des mélodies romantiques avec des textes violents.
" On remarquera le duo " Je ne t'ai pas aimé ", chanté
avec sa femme, Chiara Mastroianni, comme un lointain écho au " Fumeur
de havanes ", de Gainsbourg et Deneuve. Affaire de transmission et de théâtre
intime... " Je travaille à la maison. Donc, forcément, Chiara
est là. Pour mieux entendre mes trucs, je lui demande de les fredonner.
Au début, il a fallu que je la torture. "Tu n'as pas besoin de chanter.
Il suffit juste de bouger les lèvres et de faire le son." Et puis,
j'ai trouvé sa voix ravissante. Je lui ai demandé d'enregistrer
en Belgique avec moi. On était trois dans le studio, avec ma guitare.
On s'est demandé si on gardait le morceau. Mais le moment où on
l'a fait était tellement joli que tous les quolibets du monde n'y pourront
rien changer. On est amoureux l'un de l'autre, voilà tout. " Collaborateur
multicarte, Benjamin Biolay est au générique de bien des pochettes,
figurant à lui tout seul un annuaire de la chanson française.
D'abord, il y eut Keren Ann avec La Biographie de Luka Philipsen et ses folk
songs, bientôt suivi d'un deuxième album, La Disparition ; entretemps,
le fameux " Jardin d'hiver " avec ses rimes en " ère ",
son air de bossa, qui vit le renouveau d'Henri Salvador, dont l'album Chambre
Avec Vue culmine à plus d'un million d'exemplaires vendus... Puis viennent
en vrac Coralie Clément, sa soeur, pour qui il a écrit Salle des
Pas Perdus après avoir lu " Une jeunesse ", de Modiano. Françoise
Hardy, dont il loue la voix évanescente, le côté égérie
yé-yé qui aurait bien tourné, et pour qui il a fait une
poignée de chansons ; Juliette Gréco, enfin, pour laquelle il
s'est fait parolier d'une demi-douzaine de textes sur son album de rentrée.
BB fait tout pour dissiper le malentendu qui a longtemps fait de lui un compositeur-atrrangeur
plutôt qu'un auteur de chansons : " C'est bien joli de tomber une
mélodie, mais après il faut l'habiller avec des mots. C'est un
vrai travail artisanal. " Il ajoute qu'il est en proie à l'inspiration,
qu'il travaille des nuits entières sur son ordinateur, que son fond mélancolique
est propice à l'ériture et qu'il a en réserve deux romans,
des nouvelles et plein de poèmes. Aujourd'hui, sa vie est un peu rose
bonbon. Lui se souvient d'une adolescence tourmentée, à Villefranche-sur-Saône.
" J'ai des pensées assez noires, mais, Dieu soit loué, ça
s'arrange. " Un album qui sort... Un bébé à venir...
" Je ne pense qu'à ça. Je pense à mon disque, aussi.
Mais c'est pas la même intensité. J'attends d'être père
avec impatience et anxiété. C'est l'inconnu ! "