Benjamin Biolay en développement - le Progrès (23 mai 2003)

Son nom apparaît au bas des pochettes de disques en vogue, de Salvador à Juliette Gréco en passant par Keren Ann ou Julien Clerc. Mais le Caladois Benjamin Biolay est surtout un auteur compositeur interprète, comme en témoigne son nouvel album : « Négatif ».

On a l'impression qu'après toutes les bonnes critiques, toutes les réussites que vous avez connues ces dernières années, vous vivez un moment plus difficile à la sortie de cet album...

Ouais, c'est une impression assez juste. Un disque est en concurrence avec les précédents. Des disques j'en ai fait pas mal, même si ce n'est que le deuxième sous mon nom. Alors on se pose des questions : est-ce que je ne me répète pas, est-ce que c'était pas mieux avant... Ce n'est pas un problème de succès commercial, c'est plutôt, est-ce que dans dix ans j'aurai toujours envie de jouer ces chansons ?

Il y a eu une distorsion entre l'image de Benjamin Biolay qui a été donnée, et celle que vous avez envie de présenter...

Une distorsion énorme oui ! C'est quelque chose que l'on ne maîtrise pas du tout. Le temps que l'on aperçoive le problème, et il est déjà irrattrapable... Il y a quelques temps, je discutais avec quelqu'un qui ignorait qui j'étais, et il me sort des horreurs sur moi, des trucs totalement faux en plus. Là je me suis dit, il y a un problème... Mais je ne vais pas faire une campagne, non plus.

Est-ce que ce n'est pas dû au côté conceptuel du premier album ?

Si bien sûr, c'était complètement glamour. J'avais donc mis les costumes qui allait avec le concept de l'album « Rose Kennedy », et j'évoquais un univers très fizgeraldien qui a donné une image de moi très fausse. C'était juste un cliché...

Et celui-ci s'appelle « Négatif », est-ce qu'il y a un concept ?

Non, c'est une chanson que j'avais écrite depuis longtemps. Et je trouvais ce titre accrocheur.

A Lyon dans les années soixante-dix, il y avait un groupe punk qui s'appelait « Négatif »...

Non, c'est pas vrai... Tant mieux, j'adore les punks...

Qu'est ce qui vous a surpris en lisant les critiques de l'album ?

Je ne m'attendais pas à ce que l'on parle autant de ma vie privée et de mon mariage avec Chiara Mastroianni en parlant de musique. Je pensais au contraire qu'en faisant chanter Chiara, ça allait couper court à ce genre de propos. Je me suis vraiment trompé, sur ce coup... Ce n'est pas dramatique, mais bon. C'est comme les comparaisons avec Gainsbourg, ça me semble vraiment tiré par les cheveux. Genre, Gainsbourg a fait chanter Deneuve, Biolay fait chanter sa fille... Pour moi Deneuve, c'est plutôt ses deux cents films que son unique album avec Gainsbourg...

Vous avez produit beaucoup de gens célèbres, vous aimeriez produire des inconnus, pour une fois ?

Ah oui bien sûr, d'ailleurs je suis en train de travailler avec quelqu'un de pas connu du tout. J'allais à Lyon l'an passé, et dans le TGV, une fille vient me voir et me demande si elle peut me faire écouter sa musique. Moi je luis dit bien sûr, sans problème. Quand j'allais pour lui donner mon adresse, elle sort un ukulélé de son sac pour me chanter ses chansons. Je m'attendais à un grand moment de solitude, mais sa musique s'est avérée magnifique, et depuis on bosse ensemble...

-- Propos recueillis par Thierry Meissirel.